Pour la Cour suprême du Cameroun, Liyeplimal et Cie sont des institutions financières clandestines de monnaie virtuelle 

[DIGITAL Business Africa ] – Pour Daniel MEKOBE SONE, premier président de la Cour suprême du Cameroun, la répression des cybercriminels et des multiples délinquants qui écument les réseaux sociaux se présente comme une urgence pour le Cameroun. D’après lui, la liberté sans limite est dangereuse pour notre société.

Pour réussir la traque de ces cybercriminels, le premier président de la Cour suprême du Cameroun pense avec raison que les officiers de Police judiciaire, les brigades spéciales doivent faire bon usage des outils numériques pour mener les enquêtes contre les cybercriminels. Ce qui passe par une formation appropriée.

Digital Business Africa vous propose l’allocution de Daniel MEKOBE SONE, premier président de la Cour suprême du Cameroun, lors de l’audience solennelle de rentrée de la Cour suprême le 22 février 2023. Ici, il précisait avec détails sa pensée à ce sujet lors de son exposé le thème : « La justice camerounaise face à l’éclosion des Technologies de l’Information et de la Communication. ».

Monsieur le Président de du Sénat

Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale

Monsieur le Président du Conseil Economique et Social

Monsieur le Premier ministre, Chef du Gouvernement

Monsieur le Président du Conseil Constitutionnel

Monsieur le Ministre d’Etat, Ministre de la Justice Garde des Sceaux

Messieurs les Ministres d’Etat.

Mesdames et Messieurs les Ministres.

Mesdames et Messieurs les Ministres délégués et Secrétaires d’Etat.

Mesdames et Messieurs les Membres du Corps Diplomatique et Représentants des Organisations internationales.

Monsieur le Bâtonnier de l’Ordre des Avocats

Monsieur le Président de la Chambre Nationale des Huissiers

Monsieur le Président de la Chambre Nationale des Notaires

Messieurs les Officiers Supérieurs,

Monsieur le Gouverneur de la Région du Centre,

Monsieur le Maire de la ville de Yaoundé,

Chers Collègues Magistrats,

Chers Maitres,

Mesdames et Messieurs,

La Haute juridiction vous remercie d’avoir accepté, en dépit de vos lourdes et délicates responsabilités, d’honorer par vos présences respectives, cette audience solennelle de rentrée de la Cour Suprême.

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Cette année nous avons volontiers, choisi de partager avec vous, une thématique anxiogène pour notre société et nos concitoyens : « La justice camerounaise face à l’éclosion des Technologies de l’Information et de la Communication. »

Le développement des Technologies de l’Information et de la Communication (Internet, numérique, informatique, digitalisation)([1]) bouleverse considérablement la vie de nos concitoyens et celle des affaires.

L’analphabète d’aujourd’hui n’est plus celui qui ne sait pas lire et écrire, mais plutôt celui qui ne sait pas faire usage de l’outil informatique.

La justice Camerounaise n’est pas en marge des mutations technologiques. Elle fait face à la révolution informatique, au déploiement numérique, à l’avènement du GPS, aux modes électroniques de paiement, pour ne citer que les matières les plus récurrentes.

La justice doit nécessairement s’adapter à ces nouvelles technologies et apporter des solutions appropriées aux contentieux de plus en plus complexes qui apparaissent dans notre pays.

Les technologies semblent évoluer plus rapidement que les lois. Le Droit est-il en retard par rapport à l’évolution exponentielle des technologies? La justice Camerounaise fait-elle efficacement face au développement de la cybercriminalité ?

Nous avons choisi pour illustrer notre propos d’explorer quelques aspects juridiques où les nouvelles technologies s’affirment progressivement et invitent directement ou indirectement la justice à des métamorphoses.

En matière civile, l’informatisation de l’Etat civil est une mission essentielle confiée au Bureau National de l’Etat Civil (BUNEC)([2]).

Bientôt, les registres d’Etat civil paraphés par les Présidents de Tribunaux avant usage dans les centres d’Etat civil et les Mairies ne seront qu’un lointain souvenir. Sera-t-il donc facile de conserver les fichiers électroniques sans risque de manipulation des données ?

Les transports judiciaires dans les centres d’Etat civil pour rechercher des irrégularités dans les souches des actes d’Etat civil des actes d’Etat civil obéiront à un nouveau régime.

Toujours en matière civile, plusieurs procédures de divorce introduites devant les tribunaux ont pour causes des informations découvertes dans les téléphones ou les ordinateurs d’un époux.

Le juge se contente des transcriptions ou des enregistrements ; ces preuves doivent particulièrement être encadrées en matière civile ; car il y a un risque de montage de communication ou d’images.

En matière commerciale, l’immatriculation au registre du commerce et du crédit immobilier a été informatisée. L’inscription faite au tribunal de première instance compétent est transmise au Fichier national à Yaoundé, puis au fichier régional basé à la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage à Abidjan par voie électronique.([3])

Dans le même sillage, le commerce électronique encadré au Cameroun par la loi N°2010-021 du 21 Décembre 2010 soumet à la justice l’appréciation de la signature et de l’exécution du contrat électronique.

L’article 10 de la loi susvisée dispose que : « Le régime des contrats écrits s’appliquent aux contrats électroniques quant à leur effet légal, leur validité, à leur exécution, exception faite des types de contrats suivants :

  • Les contrats qui créent ou transfèrent des droits sur des biens immobiliers à l’exception des droits de location ».

On le voit bien le contentieux généré par le commerce électronique présente certaines spécificités [4]

De même en matière d’instruments de paiement régit par le règlement N°03/CEMAC du 21 Décembre 2016 relatifs aux systèmes, moyens et incidents de paiement (chèques, cartes de retrait, de crédit et de paiement) et de traitement automatisé de données dans le système de paiement, le législateur CEMAC invite le juge à prononcer des interdictions à l’égard des auteurs de ces infractions comme peine accessoire. Il prescrit aux Procureurs de la République d’adresser trimestriellement à la Banque Centrale la liste des personnes condamnées pour la constitution du fichier à risque.

On n’a pas l’impression que dans les tribunaux il y a une stricte observation de ces dispositions légales.

En matière de sociétés commerciales, la dématérialisation des valeurs mobilières est désormais exigée pour les sociétés anonymes, les sociétés par actions, les sociétés par action simplifiées.

Elle se fonde sur :

  • L’article 744 de l’acte uniforme sur les sociétés commerciales et le groupement d’intérêt économique.
  • La loi 2014/007 du 23 Avril 2014 fixant les modalités de la dématérialisation au Cameroun.
  • Le décret n0 2014/3763/PM du 17 Novembre 2014 fixant les conditions d’application de la loi n2014/007 susvisée.

L’organisme compétent comme dépositaire central des valeurs mobilières est la Caisse Autonome d’Amortissement.

Il y a des notaires qui n’arrivent pas à se départir de leurs atavismes et se comportent comme si la dématérialisation des valeurs mobilières n’était pas effective ; la conséquence pour les actionnaires est la perte des droits attachés aux titres non dématérialisés, ou même la vente forcée des droits attachés auxdits titres.

Le contentieux généré par la dématérialisation nécessite pour sa gestion, une bonne maitrise des textes.

En matière foncière, l’utilisation du « Global Positionning System » en abrégé G.P.S pour l’identification des propriétés immobilières dans les grandes métropoles ne donne pas toujours satisfaction. Parfois les coordonnées du titre foncier introduites dans le système orientent vers un cours d’eau qui aurait été immatriculé.

Cela montre les limites du système. On a mal renseigné le système, ou alors le système dévoile les incongruités des fonctionnaires et techniciens des affaires foncières. Comment peut-on, avec le GPS, retrouver deux titres fonciers établis pour un même immeuble ?

Si le G.P.S ne peut pas permettre d’identifier un immeuble sans contestation, il y a un véritable problème et l’expertise devient douteuse. Dans cette hypothèse, le juge peut se trouver embarrassé dans la recherche de la manifestation de la vérité judiciaire.

On peut donc se rendre compte que les nouvelles technologies impactent sur la vie du droit et de la justice dans notre pays. Mais trois aspects méritent d’être particulièrement creusés : la cybercriminalité, la cryptomonnaie et le libertinage dans les réseaux sociaux.

Excellences, Mesdames et Messieurs.

La cybercriminalité peut être définie comme une activité qui consiste à utiliser les systèmes et réseaux informatiques en général et l’internet en particulier pour poser des actes criminels ou proscrits par la loi.

Cette criminalité est difficile à saisir parce qu’elle prend des formes diverses et n’est pas enfermée dans des frontières précises. On peut distinguer les infractions purement cybernétiques de celles de Droit Commun qui sont favorisées par les technologies de l’information et de la communication.

Pour les premières on peut citer à titre d’exemples :

  • Introduction des virus dans un système d’information ou de paiement.
  • Accès frauduleux dans un réseau de communication ou dans un système d’information
  • Accès frauduleux et manipulation des données.
  • Les atteintes aux données personnelles
  • La contrefaçon et la falsification des cartes électroniques
  • Les atteintes aux systèmes de traitement automatisé de données dans les systèmes de paiement

S’agissant des infractions de Droit Commun nous pouvons citer :

  • L’escroquerie aggravée,
  • la diffusion des images portant atteinte à l’intégrité corporelle
  • la confection, le transport, et la diffusion par voie de communication électronique ou d’un système d’information, des messages à caractère pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité d’un enfant
  • Propagation des fausses nouvelles.
  • Outrage privé à la pudeur
  • Outrage à une race ou à une religion
  • Diffusion ou transmission des images obscènes
  • Le chantage
  • La diffamation
  • La dénonciation calomnieuse
  • Les injures publiques.

Le législateur camerounais a prévu dans la loi N°2010/012 du 21 Décembre 2010 relative à la cybersécurité et à la cybercriminalité au Cameroun, la procédure à suivre pour engager les poursuites contre les cybercriminels. Cette loi est combinée avec les dispositions du Code de Procédure Pénale, elle prévoit que :

Article 49 : « Nonobstant les dispositions du code de procédure pénale, en cas de crimes ou délits prévus dans la présente loi, l’officier de police judiciaire peut intercepter, enregistrer ou transcrire toute communication électronique ».

Article 50 : « si les opérateurs de réseaux de communications électroniques ou les services de télécommunications électroniques procèdent au codage, à la compression ou au chiffrement des données transmises, les interceptions correspondantes sont fournies en claire aux services qui les ont requis ».

Article 51 : « les personnels des opérateurs des réseaux de communications électroniques sont astreints au secret professionnel quant aux réquisitions reçues ».

D’après l’article 53, les perquisitions et saisies peuvent être faites dans le cadre des poursuites en matière de cybercriminalité.

Si la copie des données a été faite, le procureur de la république peut instruire pour raison de sécurité que les copies saisies soient détruites.

Par ailleurs sur accord du procureur de la république, seuls seront gardés sous scellés par l’officier de police judiciaire, les objets, les documents, et les données utilisées pour la manifestation de la vérité.

En cas de difficultés pour accéder aux informations, le Procureur de la République, le Juge d’instruction ou le Juge de jugement peuvent requérir un expert pour décrypter :

Pour toutes ces infractions, des peines principales (emprisonnement et amendes) et mêmes accessoires (confiscation et destruction des supports) sévères sont prévues par la loi.

Le décor est bien planté par le législateur. Mais on a l’impression que les Officiers de Police Judiciaire, les Magistrats du parquet et les Juges tant de l’instruction que de jugement n’appliquent pas de manière efficiente et en temps réel ces dispositions légales. On peut aussi relever que la complexité des qualifications n’est pas de nature à favoriser l’action de la justice.

S’agissant de la cryptomonnaie,

il convient de relever que depuis quelques années, sous le prisme de nouvelles technologies, une monnaie virtuelle et atypique sous plusieurs formes :« Bitcoin », « Litecoin », «Dogecoin », « Namecoin » est apparue dans notre système économique.[5]

Dans notre pays, les mains inexpertes se sont lancées dans la promotion de cette nouvelle monnaie que la banque centrale (BEAC) n’a pas reconnue. On peut citer comme institutions financières clandestines de monnaie virtuelle les structures suivantes : Mekit, Chymall, Africa, LIF, LIYEPLIMAL et surtout MIDA à Yaoundé. La liste n’est pas exhaustive.

Des milliers de camerounais se sont rués vers ces vendeurs d’illusion, vers des promesses alléchantes, mirobolantes et chimériques, mus par l’appât du gain facile. Par la suite, ils ont vite déchanté.

Les affaires Mida[6] à Yaoundé et Liyeplimal à Douala ont révélé des citoyens pratiquement en détresse, sinon en tourmente suite à l’évaporation de leur argent. On s’enrichit en un clic, on s’appauvrit en un clic. Plusieurs Milliards se sont ainsi envolés en fumée en dépit de la mise en demeure du Ministre des finances adressée aux opérateurs de la cryptomonnaie, à la suite de la Commission de Surveillance du Marché Financier (COSUMAF) qui a lancé l’alerte. Le Ministre des finances a prévenu que :

« En cas de non-respect immédiat de ces prescriptions, le gouvernement se réserve le Droit d’engager des procédures administratives appropriées et saisir les autorités judiciaires pour que force demeure à la loi »

Face à cette criminalité économique aux contours nouveaux, les OPJ, les juges d’instruction et les juges de jugements doivent s’appuyer sur les qualifications pénales existantes (usure, fausse monnaie, escroquerie avec appel au public, et les qualifications nouvelles (blanchiment de capitaux,  exercice illégal de l’activité bancaire), sans écorcher de manière substantielle le sacro-saint principe de la légalité des délits et des peines : « nullum crimen sine lege, Nulla poena sine lege », « pas de crimes sans texte, pas de peines sans texte ».

La justice doit nécessairement donner une réponse à ce phénomène qui traumatise des milliers de Camerounais. Cela peut se faire par la voie répressive ou non-répressive.

Ce marché financier souterrain est un danger pour notre économie s’il n’est pas légalement encadré. Par ailleurs, la cryptomonnaie s’est avérée être le moyen par excellence de blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme dans la zone CEMAC.

Le règlement CEMAC N°01/CEMAC du 11 Avril 2016 portant prévention, répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme, a bien incriminé ces comportements et prévoit des sanctions pénales idoines. Le juge doit s’en imprégner pour mieux les appliquer en temps réel.

Excellences, Mesdames et Messieurs,

La justice Camerounaise fait face enfin au libertinage qui creuse son lit dans les réseaux sociaux6’.

Le réseau internet est une connexion entre plusieurs machines (ordinateurs, Smartphones) et un réseau informatique mondiale, paramétré dans un ensemble standardisé de protocoles de transferts de données. C’est un système mondial d’échange de documents électroniques.

Les réseaux sociaux s’appuient essentiellement sur toutes les opportunités de communication offertes par Internet.

Il y a plusieurs décennies, le Professeur Roger Perrot, s’inquiétait, avant l’avènement de l’Internet, sur l’immixtion de l’opinion publique dans la mission des juges. Il avait écrit que : « L’opinion publique attend du juge des arrêts de cœur, mais il ne peut rendre que des arrêts de droit ».[7]

Notre pays fait face aujourd’hui à une double préoccupation : l’apparente impunité des infractions commises via les réseaux sociaux et la consécration de sortes de tribunaux populaires et virtuelles.

S’agissant de l’opinion publique entretenue par les réseaux sociaux, il est judicieux de souligner que ceux-ci s’érigent en véritables tribunaux, en officier de police judiciaire, en juge d’instruction et de jugement. Des lanceurs d’alerte aux journalistes ordinaires en passant par les influenceurs, tout y est.

On enquête, on instruit, on juge et on condamne selon les tendances choisies, ou alors les pseudo-délinquants et les suspects sont poursuivis, blanchis et acquittés virtuellement, avant même que les procédures judiciaires ne soient déclenchées conformément à la loi.

Le temps de la justice n’est pas forcément celui de l’opinion publique, encore moins celui des réseaux sociaux.

De même, des propos haineux, dégradants et humiliants sont échangés sur les réseaux sociaux sans pudeur et sans réserve.

Plus grave des professionnels de la justice, se retrouvent également indexés dans les réseaux sociaux pour avoir accompli leur mission.

Les justiciables jugent leurs juges.

Les suspects jugent leurs enquêteurs.

Les inculpés jugent leurs juges d’instruction.

Les Avocats, les Huissiers et les Notaires sont indexés.

Parfois, on fait face à une résurgence de la justice privée intolérable dans un Etat de Droit.

Il est vrai que la constitution révisée du 18 Janvier 1996 affirme dans son préambule que « la liberté de communication, la liberté d’expression, la liberté de presse, sont garanties dans les conditions fixées par la loi ». Cependant il faut relever que ces libertés ne sont pas sans limites.

A ce sujet le Président de la République, Président du Conseil Supérieur de la Magistrature a rappelé dans son discours de fin d’année le 31 Décembre 2022 que : « Je voulais une fois encore interpeller ceux qui font un usage criminel et pernicieux des réseaux sociaux. Par leurs agissements, ils plongent plusieurs familles dans la détresse et ruinent parfois des destins, en procédant notamment à la désinformation, à la diffamation ou à la propagation des discours haineux. De toute évidence, ils mettent en péril la cohésion sociale ».

Il convient de souligner que l’activité numérique qui se développe et s’intensifie avec l’accroissement des supports dédiés à l’activité et le nombre toujours plus élevé d’internautes, utilisateurs de réseaux sociaux, n’est pas un facteur négatif. Elle facilite la vie aux honnêtes citoyens et aux entreprises.

En revanche l’activité criminelle qui se développe autour de l’activité numérique met à mal l’Etat de Droit.

Notre pays ne doit pas être pris en otage par des cybercriminels. Ils doivent être traqués et jugés par nos Tribunaux, pour que force revienne à la loi.

C’est à juste titre que, son Excellence Monsieur le Président  de la République a enchainé dans son message de fin d’année 2022 et de manière ferme que : « Dans un Etat de Droit, de tels comportements ne peuvent être tolérés. Ceux qui trouvent un malin plaisir à perturber l’ordre social, qu’ils soient jeunes ou adultes, doivent rendre compte de leurs actes devant les Tribunaux compétents ».[8]

Pour mener à bien la lutte contre les dérives qui ont fait leur lit dans les réseaux sociaux, les Officiers de Police judiciaire, les Brigades spéciales doivent faire bon usage des outils numériques pour mener les enquêtes contre les cybercriminels et cela passe par une formation appropriée.

Excellences, Mesdames et Messieurs.

Notre pays est un Etat de Droit. La Constitution assure à tous les citoyens le Droit de se faire rendre justice.

Face à l’éclosion des technologies de la communication et les dérives qui s’en suivent, la Justice camerounaise doit davantage se prémunir contre la cybercriminalité, les dérives dans les réseaux sociaux  constitutives d’infraction, les différentes sortes d’escroquerie, les chantages et les atteintes à l’honneur et à la considération des personnes.

La Justice a les moyens de lutter efficacement contre les dérapages inacceptables dans notre société. Cette lutte contre la cybercriminalité passe nécessairement par la prévention et la répression.

Sur le plan de la prévention, il faut saluer, l’Agence Nationale des Technologies de l’Information et de la Communication (ANTIC) et le Ministère des Postes et Télécommunications qui travaillent sans compter, pour porter les dispositions légales à la connaissance des citoyens.

Face à la fiction juridique, « Nul n’est censé ignorer la loi », il faut avouer que « nul ne peut prétendre connaître toutes les lois ».

Cette sensibilisation continue des citoyens sur l’étendue de leurs droits et les peines prévues pour les infractions commises via les réseaux sociaux, peut largement susciter une prise de conscience chez les internautes.

Le Conseil National de la Communication (CNC) a également un rôle majeur à jouer dans la prévention et l’application des sanctions disciplinaires aux journalistes qui opèrent sur la toile.

En revanche, la répression des cybercriminels et des multiples délinquants qui écument les réseaux sociaux, se présente comme une urgence pour notre pays. Il faut se rendre compte que la liberté sans limite est dangereuse pour notre société.

Aussi devons-nous prendre des mesures appropriées pour espérer une lutte efficace :

  • Il faut une application ferme de l’arsenal juridique existant par les tribunaux.
  • Il est judicieux d’inviter le législateur à adapter nos lois à l’évolution des technologies.
  • Il est indispensable que les personnels de la justice (Magistrats, Greffiers, Avocats, Huissiers, Notaires, officiers de police judiciaire et experts) soient formés par rapport aux innovations majeures secrétées par les nouvelles technologies.

Si on n’y prend garde, notre justice risque de se trouver en déphasage complet avec les mutations technologiques mondiales qui n’épargnent pas notre pays.

Notre justice doit dans cette lutte cultiver l’urgence, sans être expéditive et garantir surtout les droits des citoyens.

Les latins ne disent-ils pas que la vertu est au milieu : « In medio stat virtus ».[9]

 

([1]) ALAUZEN (M), « L’Etat plateforme et l’identification numérique des usagers », In Revue Réseaux n°213, 2019, pp 211- 239

BOME EKALLE (M) La dématérialisation de l’administration publique camerounaise, Mémoire de Master 2 Université de Douala 2020

([2]) Bureau National de l’Etat Civil : Date de création 2013 par le décret n°2013/031 du 13 Février 2013 du Président de la République.

Etablissement public Administratif chargé d’assurer la supervision, le contrôle, la régulation et l’évaluation du système national de l’état civil.

([3]) CISSÉ Abdoullah et DIALLO Boubacar, « L’informatisation du registre de commerce et du crédit mobilier et des fichiers connexes », Droit et Patrimoine n°201, 2011, page 62.

([4]) Justine DIFFO : Droit des activités économiques et du commerce électronique, Harmattan 2011

[5] La cryptomonnaie est une monnaie virtuelle qui existe de façon numérique

[6] Affaire MIDA s’est révélée être un véritable scandale financier

6`NDJODO (L), Préservation de l’ordre public face au défi de la prolifération des Medias. Réquisitions de Monsieur le Procureur Général près la Cour Suprême le 23 Février 2022 à l’occasion de la rentrée Solennelle.

7 Roger Perrot : le rôle du juge dans la société moderne, gaz. du Palais 1977

[8] Message du chef de l’Etat à la Nation. Cameroun Tribune N°12760/8959 du Mardi 03 janvier 2023. P.2.

[9] Remy YANO Kodo, le Temps de la justice, in La Cour, Bulletin de la Cour Suprême du BENIN, P.41. juin, 2022